Au compte de trois, sautez dans l’eau glacée du canal Lachine en plein mois de février ! Voilà le défi que se sont donné environ 200 personnes — dont plusieurs politiciens — samedi après-midi, à Montréal.
Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées sur les berges du canal dans une ambiance festive pour encourager les courageux plongeurs, qui se méritaient un verre de bouillon de poulet en sortant de l’eau. Le Défi de l’ours polaire est organisé par les policiers et policières de la Course au Flambeau des agents de la paix, une organisation internationale, au bénéfice d’Olympiques spéciaux Québec. Il consiste en une vaste levée de fonds qui culmine avec un saut en eau glacée pour les personnes volontaires.
Les fonds recueillis — qui ont atteint 91 500 $ cette année, un record — sont remis à l’organisme, qui soutient les athlètes québécois vivant avec un handicap mental. Un défi identique a eu lieu à Québec la semaine dernière, où 60 000 $ ont été amassés.
Parmi les personnalités publiques qui ont sauté dans l’eau sous les encouragements nourris de la foule figuraient le chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Fady Dagher, les ministres Ian Lafrenière et Jean-François Roberge ou encore les députés Carole Mallette et Enrico Ciccone.
M. Lafrenière paraissait extatique en sortant de l’eau. Intercepté par Le Devoir alors qu’il était encore tout trempé, il a énuméré les raisons qui l’ont poussé à participer à l’évènement. « On ramasse des sous pour les Olympiques spéciaux et on sensibilise les gens à cette différence-là. Et [je viens] aussi pour soutenir les policiers : c’est une job qui est pas facile, c’est une job qui est ingrate », a-t-il mentionné.
Pour le directeur du SPVM, Fady Dagher, être présent à l’évènement est une façon de donner l’exemple. « Souvent, on dit que la légitimité d’un directeur ne se fait pas par les commandes, mais plutôt en allant sur le terrain et en montrant l’exemple, a-t-il affirmé au Devoir, quelques minutes avant de plonger. « Donc en le faisant, je m’attends à ce que mes troupes puissent se porter volontaires pour le faire aussi. »
« Je suis tellement fière de moi »
Pour Olympiques spéciaux Québec, la journée du Défi de l’ours polaire représente un moment clé de l’année. « On fait une activité un peu spectaculaire avec des élus et des athlètes parce que toute l’opération vise à dire que l’inclusion sociale, ça se fait avec beaucoup de gens, et il faut que tout le monde joue son rôle », explique Daniel Granger, président de l’organisme.
Il prépare en ce moment la participation de la délégation canadienne aux prochains Jeux olympiques spéciaux mondiaux qui auront lieu à Berlin, en Allemagne, au mois de juin.
L’une des athlètes qui y participera se nomme Jessica Larivée. Déjà médaillée à de multiples reprises dans plusieurs compétitions internationales et ce, dans plusieurs sports, comme la course à pied et la raquette, la femme de 30 ans a plongé dans le canal Lachine.
« Je suis tellement fière de moi, j’en reviens juste pas », a-t-elle déclaré au Devoir, rayonnante, quelques minutes après avoir effectué son saut. « J’avais hâte de sauter mais j’étais tellement stressée, je me demandais si ça allait bien se passer ! C’était une grosse affaire, pour moi. »
Redorer le blason
La présence de plusieurs personnalités politiques et publiques à cette activité, notamment celle du chef du SPVM, n’est pas anodine, selon le professeur au département de communication sociale et publique de l’Université du Québec à Montréal Olivier Turbide.
« Il y a un enjeu pour le SPVM d’établir un vrai dialogue avec la population et d’établir un rapport de confiance. C’est un lien qui a manqué dans les dernières années », soulève M. Turbide. Le fait d’être présent à un tel évènement permettrait donc à Fady Dagher de montrer la volonté du SPVM d’être présent sur le terrain, au sein des communautés.
« Oui, c’est des relations publiques, mais participer à des évènements comme ceux-là contribuent à établir un véritable dialogue », poursuit M. Turbide.
Il rappelle que le nouveau chef du SPVM démontre une volonté de proximité, et donne l’exemple de l’engagement qu’avait fait M. Dagher au mois de janvier sur le plateau de l’émission Tout le monde en parle. Il avait alors promis à l’humoriste Maude Landry qu’il remplacerait le frère policier de celle-ci, qui aurait dû manquer la première du spectacle de sa soeur puisqu’il travaillait ce soir-là. M. Dagher avait honoré sa promesse.
« Fady Dagher a tellement une excellente notoriété et une bonne image que [sa participation à un tel évènement], ça vient la renforcer, ça crée une image de proximité », affirme M. Turbide. « Et l’avantage d’un tel évènement, c’est que le SPVM contrôle le message. […] La police est humanisée et ça permet de mettre de l’avant leur mission sociale », ajoute-t-il.
« Pour les relations médias du SPVM, c’est du bonbon. »