Amira Elghawaby à nouveau sommée de quitter ses fonctions

Une nouvelle lettre signée par 200 personnes, dont plusieurs membres de la communauté musulmane, réclame le départ d’Amira Elghawaby et l’abolition de son poste d’émissaire fédérale à la lutte contre l’islamophobie.

La présidente du Rassemblement pour la laïcité (RPL), Nadia El-Mabrouk, a déclaré que cette demande, dont Le Devoir a obtenu copie, a été acheminée lundi matin au premier ministre Justin Trudeau.

Selon les signataires, les excuses de Mme Elghawaby, à la suite de propos jugeant que les Québécois sont majoritairement islamophobes, sont insuffisantes.

« Après avoir manifesté autant de préjugés à l’égard des Québécois, Mme Elghawaby n’a tout simplement pas l’autorité morale pour occuper un tel poste, écrivent-ils. S’il s’agit de bâtir des ponts et de poursuivre un dialogue constructif, encore faut-il pouvoir inspirer confiance. Or, ses excuses tardives et sous haute pression politique semblent plus contraintes que spontanées. »

Quant à son poste, ils assimilent la notion de lutte contre l’islamophobie à une restriction à la liberté d’expression.

Dans une entrevue au Devoir, lundi, Mme El-Mabrouk a expliqué que l’islamophobie est un terme militant qui peut être récupéré pour empêcher toute critique de la religion musulmane.

« C’est un concept qui provoque la mort à travers le monde, qui encourage la censure et l’autocensure de toute critique de l’islam fondamentaliste et du voilement des femmes », a-t-elle déclaré.

Clientélisme électoral

Mme El-Mabrouk croit que les lois en vigueur actuellement sont suffisantes pour empêcher les discours haineux contre la religion musulmane, ce qui rend inutile le poste de représentante spéciale de la lutte contre l’islamophobie créé par M. Trudeau.

« Ça ne sert à rien de multiplier les postes pour la haine contre les musulmans, la haine contre les chrétiens, la haine contre les Chinois, la haine contre les Autochtones », a-t-elle affirmé.

Mme El-Mabrouk considère que cette plus récente initiative de M. Trudeau est motivée par un clientélisme électoral envers les musulmans.

« C’est un intérêt politique électoraliste, je ne vois pas autre chose », a-t-elle dit.

Dans un texte d’opinion publié en 2019 dans le quotidien Ottawa Citizen, Mme Elghawaby déplorait l’adoption de la Loi sur la laïcité de l’État par le gouvernement de François Legault. « Malheureusement, la majorité des Québécois semble portée non pas par la primauté du droit, mais par un sentiment antimusulman », avait-elle écrit dans un texte cosigné avec Bernie Farber.

Signataires musulmans

La lettre transmise lundi à M. Trudeau est notamment signée par le professeur émérite à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, Guy Rocher, ainsi que par Ensaf Haidar, militante pour la laïcité et femme de Raïf Badawi, blogueur saoudien qui a été emprisonné par le régime de Riyad, en Arabie saoudite.

Selon Mme El-Mabrouk, environ la moitié des signataires de la lettre sont des musulmans vivant au Québec ou au Canada.

« Amira Elghawaby est loin de rassembler même la communauté musulmane », dit-elle.

Même si certains représentants de la communauté musulmane se sont exprimés en faveur de sa nomination, dont des représentants de la mosquée de Québec, Mme El-Mabrouk souligne que cette nomination ne fait pas l’unanimité.

« On n’a pas la même vision de l’islam, ils représentent un islam fondamentaliste qui ne nous représente pas. On est plein de musulmans qui sommes tout à fait satisfaits de vivre dans un état de droit, libéral, où on permet à la fois la liberté de culte et aussi la liberté de critique des religions. »

Mme El-Mabrouk est choquée de voir des représentants de la communauté musulmane s’en prendre aux dispositions québécoises mises en place par le gouvernement pour la laïcité.

« Ils représentent les musulmans conservateurs ; nous, on est des musulmans progressistes » a-t-elle soutenu.

Avant le RPL, le Mouvement laïque québécois (MLQ) avait déjà envoyé dimanche à M. Trudeau une lettre réclamant le renvoi de Mme Elghawaby et l’abolition de son poste.

Le président du MLQ, Daniel Baril, fait partie des signataires de la lettre du RPL.

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