NCLEX : le Commissariat aux langues officielles essuie un revers devant les tribunaux

Le Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick encaisse une défaite devant les tribunaux dans l’épineux dossier de l’examen NCLEX. Un juge lui interdit d’enquêter sur deux plaintes déposées en 2019.

Le juge Danys Delaquis, de la Cour du Banc du Roi, a rendu sa décision le 14 décembre 2022. Il donne raison à l’Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick (AIINB), qui souhaitait empêcher le Commissariat d’enquête à nouveau sur l’examen NCLEX-RN.

Le Commissariat a déposé une demande d’autorisation d’appel à la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick afin de faire invalider cette décision.

Un dossier qui remonte à 2015

Pour comprendre ce dossier complexe, il faut remonter au 1er janvier 2015, lorsque l’AIINB a adopté le NCLEX-RN – développé aux États-Unis – comme examen d’accès à la profession infirmière au Nouveau-Brunswick.

Cette décision n’a pas tardé à être remise en question par certains francophones.

En 2016, elle a fait l’objet d’une plainte auprès du Commissariat aux langues officielles, alléguant que l’examen était mal traduit et que les ressources préparatoires en français (par exemple des banques de questions et des simulations d’examens) étaient insuffisantes.

Le Commissariat – qui était alors dirigé par Katherine d’Entremont – a mené une enquête. Il a rendu un rapport accablant en mai 2018, dans lequel il a indiqué que l’AIINB avait enfreint la Loi sur les langues officielles du N.-B. en adoptant le NCLEX-RN.

L’AIINB n’a pas digéré ce rapport qui, selon elle, comprenait des informations inexactes. Elle a aussi dit qu’elle n’avait pas eu assez d’occasions de s’expliquer avant la publication du rapport.

En juillet 2018, Katherine d’Entremont est partie à la retraite. Elle a été remplacée sur une base intérimaire par Michel Carrier.

En août 2018, l’AIINB s’est tournée vers les tribunaux pour demander une révision judiciaire du rapport. Par la suite, l’AIINB et le Commissariat aux langues officielles ont entamé des discussions en coulisses afin de régler leur différend hors cour.

Un règlement à l’amiable

Ces discussions ont porté leurs fruits. Le Commissariat a accepté de reconnaître que l’examen NCLEX-RN en français correspondait à sa version en anglais. Il a toutefois indiqué que la question des outils préparatoires n’était pas réglée.

Le Commissariat a aussi accepté de ne pas faire de commentaires publiquement sur cette question puisqu’elle faisait l’objet d’une poursuite judiciaire intentée par la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) et la Fédération des étudiantes et étudiants du Centre universitaire de Moncton (FÉÉCUM).

En janvier 2019, l’AIINB a retiré sa demande de révision judiciaire du rapport du Commissariat sur l’examen NCLEX-RN.

De nouvelles plaintes contre l’adoption du NCLEX-RN

En juillet 2019, un groupe d’infirmières francophones a déposé une plainte auprès du Commissariat afin de faire tomber l’examen NCLEX-RN.

La présidente de l’Association francophone des aînés du N.-B. a déposé une plainte identique quelques jours plus tard.

En octobre 2019, le commissaire Michel Carrier a avisé les plaignantes qu’il n’allait pas mener d’enquête. Il a justifié sa décision par le fait que l’affaire était devant les tribunaux et a affirmé qu’il avait l’obligation de clore le dossier.

Michel Carrier a par la suite cédé sa place à Shirley MacLean, en janvier 2020.

Peu après ce changement de garde, le groupe d’infirmières est revenu à la charge et a demandé à Shirley MacLean d’enquêter sur leur plainte. Cette demande a été acceptée.

L’AIINB s’est opposée à cette décision. Elle a argumenté que ces plaintes contenaient les mêmes allégations que la plainte déposée en 2016 (qui avait mené à la publication d’un rapport en 2018).

L’AIINB a aussi argumenté que le lancement de ces nouvelles enquêtes allait à l’encontre de l’entente hors cour conclue entre l’AIINB et le Commissariat en 2019. Des échanges ont eu lieu entre les avocats des deux parties pendant des mois.

Le Commissariat a finalement décidé une fois pour toutes, en octobre 2021, d’enquêter sur l’examen NCLEX-RN malgré l’opposition de l’AIINB. Cette dernière s’est donc tournée vers les tribunaux pour lui bloquer la route.

Le juge Danys Delaquis, de la Cour du Banc du Roi, a récemment tranché en faveur de l’AIINB.

Dans sa décision du 14 décembre 2022 – qui sort du lot par sa longueur, soit 100 pages – il affirme notamment que le Commissariat n’avait pas l’autorité législative d’enquête sur un sujet qui avait déjà fait l’objet d’une enquête et qui avait été réglé, ni de revoir une décision précédente de refuser d’enquêter sur la même plainte et de clore un dossier.»

Donc, en gros, le juge Delaquis a déterminé que Shirley MacLean ne pouvait pas revenir sur la décision de Michel Carrier de ne pas enquêter sur des plaintes déposées à l’été 2019.

À la toute fin de sa décision, le juge interdit formellement au Commissariat d’enquêter sur ces plaintes.

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